La Chine se méfie de Starlink, mais a d’autres priorités


En Chine, Elon Musk est comme Janus : il a deux têtes. D’un côté, un Américain qui ouvre une méga-usine automobile à Shanghaï, en 2019, au pire moment de la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis, ne peut pas, aux yeux du Parti communiste chinois, être foncièrement mauvais. D’autant que ni les droits de l’homme ni l’avenir démocratique de Taïwan ne semblent l’obséder outre mesure. Quant aux anticommunistes, ils ne cachent pas leur admiration pour ce libertarien qui dit tout haut ce que nombre d’entre eux pensent tout bas.

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D’un autre côté, cependant, il est le fondateur de Starlink. Pour un régime qui repose en partie sur le contrôle de l’information, cette myriade de satellites lancés par une société partenaire du ministère de la défense américain représente une réelle menace. Acquérir un terminal Starlink est strictement interdit en Chine. Mais il y a plus : selon une « note verbale » envoyée par la Chine aux Nations unies, en décembre 2021, deux satellites de la constellation ont failli entrer en collision avec la station spatiale chinoise, le 1er juillet et le 21 octobre.

A chaque fois, selon Pékin, la station chinoise a dû procéder dans l’urgence à une manœuvre d’évitement. Ces incidents ont jeté de l’huile sur le feu qui couve en permanence entre Pékin et Washington. Le ministère des affaires étrangères chinois affirme avoir envoyé plusieurs mails au département d’Etat pour se plaindre. Ce dernier dément les avoir reçus. Le lobby militaro-industriel chinois en a tiré les conséquences : « Il faudrait adopter une combinaison de mesures douces et dures pour que des satellites Starlink soient rendus inopérants et pour détruire le système opérationnel de la constellation », ont écrit plusieurs chercheurs dans un article paru dans la revue Modern Defense Technology, en avril.

« Viser différents marchés »

Mais dans ce pays qui a fait de la conquête spatiale l’un des symboles de sa grandeur, la réponse à Starlink ne peut pas être que destructrice. La Chine a-t-elle besoin d’une constellation comparable ? Pas évident. « Les opérateurs publics ont construit en Chine le meilleur réseau 4G-5G du monde. Je viens de faire un aller-retour dans le Gansu [dans l’ouest du pays]. Hormis dans les tunnels, j’ai pu communiquer durant tout le voyage et j’ai même eu une réunion Zoom durant une heure. Starlink est un bon “back-up” à AT&T et T-Mobile aux Etats-Unis, mais, selon moi, un réseau de satellites Internet en Chine devrait viser différents marchés, comme l’aéronautique ou le transport maritime », juge Tianyi Lan, PDG d’Ultimate Blue Nebula, une société de conseil sur le spatial, sise à Pékin.

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Catégorie article Politique

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